mardi 18 septembre 2012

Fabriquer un dolium

Un peu de technique pour changer...

Fabriquer un dolium? C'esrt quoi, ce truc?
Un dolium, c'est un grand, parfois un très grand vase destiné à servir de réserve ou de réservoir. On pouvait y mettre de l'eau, bien sûr, mais aussi du vin, de l'huile ou des céréales. Dans certaines régions du sud de la France, le dolium a parfois correspondu à la consommation annuelle de céréales pour une personne. Environ 60 à 100 litres de capacité. Pour les plus grands, souvent des cuves de pinardiers, on a atteint les 10'000 litres. Mais pour des tailles pareilles, ce ne sera pas le sujet du jour. Là, on en reste à une cinquantaine de litres. Un petit modèle, donc, mais un jolie petite aventure.

L'histoire commence lors de la commande d'un gros lot de répliques de céramiques gauloises pour la très médiatisées exposition "les Gaulois, une expo renversante" qui se tient encore à la Cité des Sciences, au Parc de la Villette à Paris. Et dans ce lot figurait justement un dolium gaulois, réplique de l'un d'entre eux découvert à Croixrault, dans le département de la Somme.
Généralement, on commence par un descriptif tel que ci-contre. Un dessin montrant la coupe et l'extérieur du vase, l'échelle et un descriptif de pâte et de couleurs. L'originalité de ce modèle, qui n'est pas une exception dans le monde antique, est l'extrême grossièreté de l'argile utilisée. Si de telles terres étaient fréquemment employées à la fabrication de grandes pièces dans les mondes gaulois ou gallo-romains, le potier d'aujourd'hui est terrifié à l'idée d'utiliser un tel matériau.
Le texte dit "dégraissant chamotte et silice, gros éléments"... Un téléphone au céramologue INRAP qui a participé à la fouille me confirme l'ampleur du problème. Les gros éléments, c'est 6 à 8 mm. Le moins que l'on puisse dire est que cela demande réflexion. Je connais quelque peu ces pâtes pour en avoir vu des tessons. Disons pour simplifier que c'est beaucoup de gravier avec un peu d'argile pour le lier. Tellement de gravier et de tellement gros éléments que parfois des cailloux dépassent des deux côtés ds parois. A l'intérieur et à l'extérieur. Et comme en principe un tel récipient doit au moins à peu près être étanche, il vaut mieux que ces "gros éléments" adhèrent bien à la matrice argileuse. Dans le cas contraire on aura une passoire dans le meilleur des cas, et au pire quelque chose qui au moindre choc va se désagréger et redevenir gravier et poussière d'argile.... le pire est que ce dolium sera transporté par camion à Paris, dans une palette. Donc si il n'est pas assez solide, ça va faire mal!
Après quelques plaquettes d'essais qui se sont montrées encourageantes, je me lance.
D'abord préparer le mélange d'argiles, de chamotte et de silice. Je choisis d'abord une argile siliceuse fortement dégraissée. 40% de chamotte blanche de 0 à 2 mm. Puis je prépare une charge supplémentaire constituée de terre cuite concassée et de quartzite pliée. C'est un matériau que l'on trouve facilement dans les moraines glacières, donc dans presque tous les champs du plateau suisse qui ont autrefois été recouverts par les glaciers.
On concasse, on broie, on tamise et ça donne ceci à gauche. C'est aussi coupant et rugueux que vous pouvez l'imaginer. Mais ces matériaux adhèrent bien à l'argile, et ensuite le retrait au séchage et à la cuisson vont parfaitement les enserrer, à tel point que lorsque l'on rompt une plaquette d'essai, il arrive que la cassure partage un élément de quartz en deux.
Pour la terre cuite, j'ai pris de vieilles tuiles du XIXème siècle moulées à la main. Elles sont constituées d'une terre très sableuse qui convient bien à ce genre d'usage. Et en plus elles sont faciles à concasser. Ensuite, il faut mélanger et pétrir avec l'argile. Détail qui tue; avec des gants de protection, ça ne va vraiment pas bien...
Il vaut donc mieux trouver rapidement la bonne méthode, celle qui permet d'éviter de coincer des morceaux de quartz sous les ongles, et de se déchiqueter les doigts, sinon l'expérience risque de tourner court. Parce que ce mélange, il faut en préparer 20 kg environ, et il faut vraiment bien le pétrir...
Et c'est après seulement que je m'ataque à la construction. Technique de colombin battu, c'est peut-être la seule qui soit raisonnable dans ce cas de figure.
Je prépare de gros colombins de 5 cm. de diamètre environ que je pose et pétris soigneusement afin de les coller au mieux. Puis le les amincis par pincement successifs, et surtout veille à bien recouvrir les joints d'assemblage des colombins. Je travaille sur une grosse tournette, système connu depuis la plus haute antiquité. Cet outil permet pratiquement toutes les opérations de tournage, rectifiage ou modelage de petites ou  de grosses pièces, c'est le tour universel par excellence.
 On voit ici que le mélange d'argile est très maigre et très peu homogène. Il faut absolument y remédier, faute de quoi les porosités, voire les trous dans les parois risquent d'affaiblir la pièce. Le meilleur moyen de remédier à cet inconvénient est de battre la paroi afin de tasser l'argile- Pour ceci, je travaille à la batte, une sorte de grosse spatule de bois, que l'on utilise contre un appui
Comme enclume, je me sers de divers tessons, ici, un gros morceau d'amphore Dressel 20 à huile. C'est sufisamment lourd por bien répondre aux chocs, et la courbure est parfaite à ce niveau de montage.Les chocs successifs vont non seulement amincir les parois, mais aussi contribuer au collage des colombins et à améliorer l'agglomérat des différents éléments. Il ne faut pas ménager ses efforts, il faut des milliers de coups de batte pour un tel récipient.
On prendra un choix de tessons ou d'enclumes diverses à adapter à chaque variation de courbure de la panse. Ici, c'est un morceau de marmite éclatée à la cuisson. Son rayon de courbure plus faible permet facilement d'ajuster l'épaisseur des parois du dolium.
Et petit à petit. à force de coups de batte, les éléments s'intègrent à l'argile et le dolium prend son galbe définitif.
Parfois , de petites corrections à l'estèque sont nécessaires, elles permettent d'ôter les surplus de terre qui forment des bourrelets ou des surépaisseurs indésirables.
Et à la longue, le dolium prend sa forme définitive, les gros éléments s'intègrent à l'argile, les aspérités, irrégularités et autres vacuoles indésirables disparaissent...
Le diamètre atteint ici son maximum, il ne reste plus qu'à monter le haut de la panse et le col...
...ce que je finis à l'intérieur, on orage m'ayant fait déménager en catastrophe...
Un dernier coup d'éponge sur la panse, le col rectifié par tournage et c'est terminé! Le poids du vase additionné à celui de la tournette donne un excellente inertie et rend ce type de tournage de la partie supérieure possible. Je ne dirai toutefois pas qu'il est facile, et les morceaux de quartz ne facilitent pas la chose...
Ce jour-là. il faisait très chaud et très sec. L'idéal pour ce genre de travail, la pièce séchant très rapidement au fur et à mesure du montage. Trois petites heures ont été nécessaires, mais si le temps avait été très humide, il aurait fallu observer de longues pauses entre chaque opération afin d'éviter que la pièce s'effondre sous son propre poids. Ce n'est pas un problème pour un atelier traditionnel. Si le temps est humide on fabrique plusieurs pièces simultanément, jusqu'à 10, voire plus, et en passant de l'une à l'autre, cela leur laisse le temps de sécher calmement.

Peu d'outils sont nécessaires pour de telles fabrications:

Trois tessons, une batte, deux éponges, une estèque et deux galets ont été nécessaires. Les galets sont principalement utilisés pour les corrections en cours de séchage, si des morceaux de quartz dépassent trop de la surface. Il ne s'agit pas de faire un polissage, mais plutôt de gommer des aspérités indésirables.
Et si on avait voulu fabriquer un dolium de 500  litres, nous aurions utilisé les mêmes outils, toutefois un peu plus lourds. le parois un peu plus épaisses requérant des gestes un peu plus énergiques.
La bête après cuisson. Elle a parfaitement résisté à l'épreuve du feu, et elle résistera aussi au transport. Elle a subi une réduction partielle qui est toutefois très peu marquée. Certaines argiles de cette fournée sont devenues grises, mais celle-ci est restée orangée. Aléas de la cuisson au bois...

Prochainement, une autre méthode pour fabriquer les dolia, avec une argile plus fine...



jeudi 6 septembre 2012

Nasium. Les éléphants d'Hannibal

Certains se seront déjà posé la question lors de l'article précédent. Mais où se trouve Nasium?. Qu'est-ce que Nasium. C'est quoi ce bidule?
Bien sûr, il y a Wikipédia, plus quelques autres sites intéressant sur le sujet...
Mais voici quelques éléments de réponses.
Nasium, dans l'antiquité, c'est la capitale de la Cité des Leuques. Kesacko?
les Leuques sont un peuple, une tribu gauloise. Etymologiquement cela veut plus oui moins dire " Les Fulgurants". Géographiquement, ils se situent en actuelle Lorraine, dans le département de la Marne, limités à l'Est par la chaîne des Vosges, et à l'Ouest par la Vallée de la Meuse. C'était autrefois un peuple gaulois puissant, et César est le premier à en parler dans ses "Commentaires" à propos de livraisons de blé en échange de sa protection contre Arioviste et ses troupes, et Lucain dans les Pharsales les qualifie d'"habiles à manier le javelot et le dard"
La première capitale des Leuques semble être l'oppidum de Boviolles au-dessus du hameau du même nom. Après la conquête romaine, cette capitale sera déplacée dans la vallée, ce qui lui permettra un développement plus important par l'accès facilité à l'eau et aux voies de communication.fluviales et terrestres. Ce sera la ville de Nasium, qui se trouve actuellement en partie sous le village de Naix-aux.Forges, et se prolonge du côté de Saint-Amand-sur-Ornain, sans toutefois atteindre cette localité. Précisons encore que l'administration romaine conserva les limites territoriales des tribus gauloises pour l'établissement des Cités, qui sont des entités territoriales, subdivisions des provinces, et non des villes en elles-mêmes. La Cité peut se comprendre comme un ensemble de citoyens répartis sur un territoire délimité, la capitale de cité ayant une dénomination différente en tant que ville. Elle pourra être "colonie" ou plus simplement "Caput Civitas" par exemple. Toul (Tullum ou Tullium Leucorum) fut aussi une importante ville de la Cité des Leuques.

L'assiciation " Nasium. la Cité des Leuques" s'efforce depuis plusieurs années à faire connaître et à vulgariser l'histoire de cette ville oubliée que fut Nasium. Car oubliée elle le fut bel et bien. et ce n'est que lors de découvertes fortuites par les exploitants agricoles ou lors de la construction de maisons que l'on commença au XIXème siècle à s'intéresser au lieu. Depuis, plusieurs fouilles dont certaines sont en cours, ont pu dégager un important sanctuaire et des quartiers d'habitations, mais on est encore loin de connaître tous les détails de l'extension de la ville et son organisation. Les vestiges visibles sont pratiquement inexistants, et c'est donc par le biais de l'histoire vivante, la reconstitution historique et l'archéologie expérimentale que l'association fait revivre les belles heures de Nasium, par des animations scolaires, mais aussi par des visites guidées de l'oppidum de Boviolles et des quelques traces subsistant du sanctuaire. Mais aussi par de grandes fêtes romaines ou gauloises ou le grand public peut admirer civils au travail et militaires à la manoeuvre, reconstitutions de combats ou d'édifications de fortification. Et cette fête c'étaient les 30 juin et 1er juillet derniers, à St.-Amand-sur-Ornain.
Cette année, le thème était: "La fureur des éléphants d'Hannibal", avec la toute nouvelle troupe de reconstuitution "Carthago" qui se produisait avec son éléphant!
La troupe Carthago au grand complet. Photo C Yann Kevran / Carthago
Mais il y avait aussi la Legion XXII Primigenia, l'excellente formation militaire de l'association " la Cité des Leuques"
Prêts au combat pour une reconstitution d'un assaut contre les Gaulois! épées de bois et lances "bluntées" sont de mise pour ce genre de reconstitution! 
 Dés 10 heures le samedi matin, les démonstrations vont se succéder à grand ryttme pour le public venu en nombre pour l'événement. Pendant ce temps, comme je le décris en détail dans l'article précédent, nous démarrons une grosse fournée de poteries dans l'installation toute fraîchement construite.
Laurent, le tailleur de pierre et deux légionnaires inspectant le four. (Photo Jacques Maréchal / www.pixures.be)
Si de nombreux artisans et civils animent cette fête, le clou du spectacle est évidemment la reconstitution de combats et l'entraînement de l'éléphant de guerre.
Défilé de la Legio XXII primigenia Pia Fidelis (Photo C Pierre Legeay)
Choc contre des guerriers gaulois, Ca cogne dur! (Photo C Pierre Legeay) 
Les romains ont affaire à forte partie, les carthaginois ont engagé de nombreux auxiliaires gaulois en renfort.
Pascal Minne en général carthaginois...
Et Jérémy Dardenne, son fidèle centurion, le "sirdar"
Et le dimanche, en attendant le défournement, quelques belles démonstrations de tournage au tour à bâton pour le plaisir du public! Quelques beaux clichés de Jacques Maréchal, photographe officiel de la manifestation. Sur son site (www.pixures.be) vous retrouverez des dizaines de photos de l'évènement!
A lancer la roue! (Photo Jacques Maréchal / www.pixures.be) 
Les mains dans la terre... (Photo Jacques Maréchal / www.pixures.be)
La satisfaction d'avoir tourné une belle pièce! (Photo Jacques Maréchal / www.pixures.be)  
Défournement en public.
La fête se termine sur le défournement. L'installation reste en place, elle constitue en quelque sorte la première pierre de ce qui deviendra un "vicus" (village) gallo-romain et un camp militaire. Les charpentes des premières maisons sont livrée, la construction de ce qui deviendra la Nasium reconstituée commencera sous peu!

Pour visiter le site de l'association "Nasium, La cité des Leuques": http://nasium.net/
Pour voir toutes les photos des membres de l'association:  http://nasium.net/spip.php?rubrique27
Pour visiter le site de Jacques Maréchal: http://www.pixures.be/fr/indexfr.htm
Pour visiter le site de l'association Carthago: http://www.carthago-reconstitution.com/

mercredi 5 septembre 2012

Une cuisson réductrice à Nasium

C'étaient les 30 juin et 1er juillet derniers à Nasium, lors de la fête romaine "Les éléphants d'Hannibal", organisée par l'association "Nasium, la cité des Leuques". Pas seulement pour l'occasion, mais aussi en vue de la construction des futurs village et camp militaire de l'association, nous avions construit un four de potier gallo-romain, et lors de cette fête il fut dûment inauguré.

L'aventure débute au début du mois de juin, à la maison de l'association, à St.-Amand-sur-Ornain, dans la Meuse, commune située à l'orée de la ville antique de Nasium, capitale de la Cité des Leuques. C'est bien joli, de construire un four et de le mettre en service lors de la fête, mais encore faut-il avoir quelque chose à y mettre en cuisson! Un gros travail de recherche a été effectué en amont pour retrouver des types de céramiques correspondant à la fin du Ier siècle dans la région, et le 6 juin au matin, le tournage commence. Il s'agit là d'une reconstitution intégrale, les céramiques seront toutes tournées, retouchées et si nécessaire polies sur le tour à bâton. Ce type de travail est probablement plus difficile que sur un tour moderne, et même sur un tour à pied, mais peut engendrer de petits défauts de fabrication ou de finition qui permettent mieux de comprendre la manière dont ont été fabriqués les récipients à l'époque que nous tentons de reconstituer.
Retouche d'un col au galet afin de gommer les irrégularités et bavures issues du tournage. ( Photo Pierre Légeay)
Polissage au galet avant le décor ( Photo Pierre Légeay)

Après ébauche et temps de séchage obligatoire d'une journée, les pièces sont polies au galet ou simplement lissées au doigt ou à l'éponge. Certaines d'entre-elles porteront un décor réalisé à la roulette.
Décor à la roulette sur un tonnelet alsacien ( Photo Pierre Légeay)
Cette technique semble toute simple, mais demande un bon doigté et une concentration parfaite. Il faut doser la pression et bien conduire l'outil afin d'éviter enfoncements, chevauchements de lignes et erreurs de raccords, tout en surveillant la vitesse de rotation du tour. Vous vous souvenez lorsque la première fois vous êtes montés sur un vélo? Eh bien c'est à peu près le même problème que lorsque vous avez essayé de rouler bien droit...
Les pièces sont ensuite mises à sécher pour 2 semaines. une bonne quarantaine au total, qui formeront la base de la vaisselle de l'association et du futur village.

Et le 30 juin, dans le four tout nouvellement construit , le chargement débute dans la matinée, lors de l'arrivée des premiers spectateurs et des premières animations. le prochain article sera plus particulièrement consacré à la fête romaine.
Avec mille précautions, les pièces sont amenées du local vers le four et y seront chargées, puis recouvertes de tessons qui assureront la retenue de chaleur nécessaire. le couvercle de la casserole, en quelque sorte.
Le four sous son abri construit pour l'occasion. C'est un four-puits à tirage vertical muni d'une sole perforée, comme l'immense majorité des fours d'époque gallo-romaine.
La cuisson doit durer de 8 à 10 heures. Cette durée est incertaine, le four étant tout neuf. Nous l'avons séché et partiellement cuit le soir précédent, mais le fonctionnement d'une installation neuve étant toujours un peu incertain, la durée de l'opération peut considérablement varier. Il a été prévu de terminer de nuit afin de bien assurer la température de cuisson par l'observation des couleurs d'incandescence.
Les surprises sont parfois bonnes. En milieu d'après-midi déjà, on distingue le rougeoiement entre les tessons, preuve que la température monte très rapidement.
Et dès 19 heures, les gaz de combustion se réenflamment dès leur sortie. Les céramiques seront bientôt cuites à point. Bien avant la nuit, d'ailleurs. Ce four révèle un exceptionnel tirage et une grande puissance.
Dernier rayon de soleil sur les tessons de couverture. la coulewur d'incandescence paraît parfaite, il est temps de mettre un terme à la cuisson.
Un peu avant vingt heures, un bonne couche de cendres est déposée sur les tessons, puis le tout est colmaté au torchis. Le foyer est obturé et parfaitement étanché afin d'éviter toute intrusion d'air atmosphérique. Puis on laisse macérer jusqu'au lendemain après-midi. Le monoxyde de carbone, puis les fumées asureront, si tout se passe bien, la réduction puis l'enfumage des céramiques. Une fois le four scellé, nous n'avons plus aucune prise sur le processus...
Le lendemain, on perce d'abord des évents sans la croûte de torchis pour laisser passer un peu d'air et accélérer le refroidissement. Puis vers 17 heures, c'est l'ouverture.

Sitôt la couverture ôtée, on s'aperçoit que la cuisson est réussie. les pièces ont parfaitement pris la réduction et l'enfumage est correct. Tout paraît uniformément gris par le saupoudrage de cendres, mais une fos lavées les pièces arboreront des coloris très divers, plusieurs argiles ayant té utilisées pour réaliser ce lot.
La première couche d'assiette prélevée, on trouve de grandes jattes restés grises par leur argile particulière, tandis que d'autres pièces sont d'un noir bleuté.

Deux pots à cuire. Au premier plan, une pièce en argile grossière à gros dégraissant. Cette argile a la particularité de très mal prendre la réduction, et souvent ses coloris varient du brun-roux au noir, avec un coeur de tesson toujours brun-rouge.. Au second plan une pièce constituée d'uen terre très différente, qui prend beaucoup plus facilement la réduction. à la cassure son tesson est gris à coeur.
Assiettes alsaciennes en "Terra nigra". Ce terme latin, "terre noire" en français, illustre parfaitement le produit. Une argiel polie, noircie en surface par enfumage. Ces céramiques sont extrêmement courantes dans tout l'Est de la France. le coeur de tesson peut être gris plus ou moins clair, parfois blanc, mais aussi brunâtre selon les argiles utilisés. Pour réaliser ce type de produit, on sélectionne toujours des argiles prenant bien l'enfumage. Un bon polissage accentue encore la profondeur et l'intensité des noirs.
Réaliser un enfumage uniforme est une opération difficile, et les variations de teintes sont fréquentes. la cloche à pain ici illustré en est un bel exemple. Les flux de gaz irréguliers à l'endroit où elle était située ont laissé une forte empreinte sur cette pièce. es endroits sont presque blancs alors que d'autres portent de forts reflets métalliques


Le lot de pièces défournées en présence de Marion Legagneux, tout fraîchement diplômée archéologue, et future spécialiste en céramologie, ainsi que d'Olga, doctorante russe en archéologie aussi. Presque pas de casse, seulement trois pièces ébréchées par la chute de cales ou par des chocs lors de la cuisson.

Tout prochainement, un reportage sur cette fête romaine et un aperçu sur la construction du four!