Avant d'attaquer les chapitres techniques, il convient de faire une petite présentation. Qu'est-ce qu'une amphore gréco-italique?
Son nom dit clairement son origine: Grèce, et surtout Italie, notamment la Côte tyrrhénienne. Mais aussi la Sicile, et peut-être d'autres régions encore. Les débuts de sa production sont à situer vers 350 av. J.-C. à une époque ou l'essentiel de l'Italie méridionale était encore la Grande Grèce. ce n'est que vers 280 à 270 que le la plupart des cités grecques d'Italie méridionale rentreront dans l'alliance romaine.
Les dernières cités indépendantes ne tarderont pas à suivre le mouvement, de gré ou de force. Tarente tombe en -272 lors de la guerre de Pyrrhus, puis avec Syracuse prend parti pour Carthage lors de la seconde guerre punique. Ces deux villes tombent en -211 après un siège de trois ans. C'en est fini de la Grande Grèce, l'Italie est désormais romaine...
D'où donc cette appellation de "gréco-italique" pour ces types d' amphores. Eh, oui ces types, parce qu'il y en a plusieurs... 250 ans de production, c'est long, et tous les types de céramiques évoluent. Les modes changent, les techniques aussi.
L'amphore gréco-italique est dérivée d'une forme étrusque très trapue, dont les premiers exemplaire produits vers 350 av. J.-C vont s'inspirer. Elle s'effile au cours des années pour aboutir à une forme beaucoup plus élancée.
il s'agit en fait d'une évolution continue qui aboutit aux amphores tardo-républicaines de type "Dressel 1" que l'on trouve en grand nombre notamment dans les Gaules, comme ce bel échantillonnage ci-dessous, exposé au Musée des Antiques Saint-Raymond de Toulouse:
Il ne s'agit assurément pas principalement de questions esthétiques, même si encore aujourd'hui le vin nous paraît meilleur si la bouteille ou son étiquette sont plaisants. A mon sens, bien qu'il semble qu'aucune étude approfondie n'ait été menée dans ce sens, il faut y voir une adaptation à l'évolution des coques de bateaux de transport maritime. L'exportation du vin, principalement vers les Gaules, prendra des proportions gigantesques au cours du temps pour atteindre son apogée vers le milieu du Ier siècle avant notre ère, aux temps de la Guerre des Gaules. des navires de plus en plus gros pourront transporter des milliers de pièces. L'épave de la Madrague de Gien, par exemple, en contenait un peu plus de 6000! Une charge de 350 tonnes pour un navire de 40 mètres de long, 9 de large et un tirant d'eau d'environ 4m. 50. Le calage du chargement sur trois couches était essentiel pour éviter la casse. Qu'une seule amphore se brise et tout un secteur de la charge était déstabilisé et on risquait le pire!. Adapter la formes de ces amphores à la forme de la carène du navire permettait d'augmenter le sécurité du transport.
Mais revenons à l'objectif du jour: Fabriquer deux pièces "LW-E" Cette codification, assez typiques des petits barbarismes céramologiques provient de la chercheuse, Elisabeth Lyding-Will, une autorité en terme d'études "amphoristiques" et qui fut la première à établir une typologie et proposer des datations pour ce type d'amphores. On abrége, et les gréco-italiques se subdivisèrent désormais en LW-A, B. C. D et E...
Et dans la pratique, ce sont des hybrides entre LW-D et E dont nous allons suivre la fabrication.
Leur forme peut assez considérablement varier d'une fabrication à l'autre, comme le montrent des deux exemplaires issus de fouilles de Lattes. Col plus ou moins long, plus ou moins cintré, épaule plus ou moins marquée, quille proéminente ou pas, différences de galbe. Il ne s'agit plus là de questions de carènes de navires, mais plutôt de la "main du potier". ou d'un "style de fabrique", les formes variant d'un atelier à l'autre, d'un tourneur à l'autre.
A mon sens, ces gréco-italiques comptent parmi les plus belles des amphores par leur élégance et la douceur de leurs lignes. Mais ces caractéristiques les rendent difficiles à réaliser. Raccorder leurs courbes est un bel exercice de style qui n'est pas à la portée du premier venu. (ou de la première venue, bien qu'il faille être équipé d'épaules assez solides pour tourner les sections basses de ces pièces).
Première étape, le tournage des sections. Ce sont des pièces "assez courtes". 90 à 95 cm. et leur col ne dépasse pas les 30 cm, ce qui permet de les monter en trois parties. Plus simple donc que les Dressel 1 plus tardives, plus hautes (110 à 155 cm) qui nécessitent 4 sections. On pourra se reporter à l'article "amphores" pour les détails: http://arscretariae-archeoceramique.blogspot.ch/p/amphores.html
En premier la "quille", partie basse, qui se tourne à l'envers:
Sur un tour italien à pied, cela nécessite quelques contorsions, cette section étant assez haute, à peu près 45 cm. On tourne un cylindre que l'on rétrécit jusqu'à le fermer complétement pour former la quille.
On veille soigneusement à conserve un angle correct à la base de cette section qui, une fois retournée, devra se raccorder sur la panse. Le diamètre est soigneusement mesuré.
Puis on tourne la panse.
Elle se tourne à l'endroit, partant du diamètre de la base de a quille renversée. le haut amorce l'épaule de l'amphore. Un gros morceau à tourner. 9 kg. de terre, cela demande une certaine énergie.
Comme la quille, cette section reste sur son rondeau.
Et on passe au col. presque facile, seulement 4,5 kg de terre.
Là aussi, on veille à raccorder les inclinaisons et les diamètres. Le tournage se fait à l'envers, l'ébauche restant aussi sur son rondeau.
Les trois éléments sont prêts. La quille, environ 40 cm. de hauteur, la panse, 30 cm. et le col, environ 35. Soit 1m. 05 pour le tout. Avec les pertes au greffage, puis le retrait au séchage, cela nous laissera une pièce d'un peu plus de 90 cm. une fois cuite. A droite, une pièce terminée, toujours dans son mandrin, en cours de séchage.
Une nuit de séchage pour raffermir les élément et on peut passer au montage:
Je reprends le travail sur un tour à main. le tour italien n'est pas adapté à ce type de montage, et en plus je n'ai pas la hauteur de plafond suffisante pour ce travail. Donc on reprend sur le bon vieux tour à bâton, qui devient tour à main pour l'occasion...
On place la quille dans un mandrin de maintien, et on la sépare de son rondeau. Puis on pose le premier greffon. Il aura fallu préalablement le séparer aussi de son rondeau. Comme il est encore très mou, j'ai collé une plaque de bois sur sa partie supérieure pour éviter les déformations trop importantes, et je l'ôte sitôt après la pose. Les angles au niveau du greffage sont légèrement rentrants. C'est voulu, car beaucoup plus facile à corriger lors du tournage du raccord. Le contraire nécessiterait un gros travail de frappe pour diminuer les diamètres.
Le raccord de greffe en cours de tournage. Il reste une petite inégalité à corriger.
Lorsque le raccord est terminé. on prépare la greffe du col. la pose de la panse peut avoir provoqué quelques déformations, vite corrigées par une passe de tournage.
Il vaut mieux assurer le coup, et présenter délicatement le col, au cas où une retouche ou une correction d'angle serait nécessaire.
On peut ensuite passer au tournage du second raccord de greffe.
Puis on finit la lèvre. comme le col était tourné à l'envers, cette partie proche du rondeau est encore très molle et l'opération est ainsi facilitée.
Il vaut mieux attendre quelques heures avant de poser les anses. le raccord de l'épaule est encore très fragile à la fin du montage. Poser les anses immédiatement fait courir le risque d'enfoncements toujours difficiles à rattraper.
Opération terminée! On laisse raffermir un jour ou deux dans le mandrin, puis on pourra la transporter jusqu'à son lieu de séchage complet...
En l'occurrence la pièce à vivre. L'atelier est bien trop petit pour une telle population. Ces élégantes vont rejoindre le reste de la prochaine fournée, des Dressel 1B. Cinq quadrantales de 26 litres et une bâtarde de 19.
Elles auront tout le temps. A court de bois sec pour le four à amphores, elles devront patienter un bon mois encore.
Vous aussi, d'ailleurs, si vous souhaitez lire le récit de leur cuisson...
Libellés
- Archéologie expérimentale (8)
- Au jour le jour... (11)
- Cuissons gallo-romaines (5)
- Cuissons gauloises (4)
- Evénements (14)
- La céramique du haut moyen-âge (5)
- Le coin des céramologues (3)
- les fours antiques (4)
- Les types de céramiques antiques (8)
- Musées et collections (5)
- Techniques de fabrication (12)
mardi 15 avril 2014
mercredi 2 avril 2014
Les Fêtes du Forum à Martigny
PROCHAINEMENT A MARTIGNY (CH)
FÊTES DU FORUM
samedi 17 et dimanche 18 mai 2014.
Dédiée à l'histoire romaine de Martigny, l'antique Forum Claudii Vallensium, plus connue sous son nom gaulois d'Octodurus.
Deux jours pour revivre les fastes de l'Antiquité,
Deux jours dans et autour de l'amphithéâtre. Des troupes prestigieuses et les meilleurs artisans du moment pour vivre l'Histoire en direct!
Les fêtes du Forum à Martigny,
Un évènement à ne pas manquer!
Plus de renseignements et le programme sur le site des Fêtes du Forum : http://lesfetesduforum.ch/
La page Facebook de l'évènement : https://de-de.facebook.com/ LesFetesDuForum
La boutique du potier romain.
Un petite partie de la production de l'hiver. Et aussi ce uiq peut ressembler à un stock d'un marchand gallo-romain de céramiques entre autres biens de consommation.
Une belle série de mortiers, marmites et plats à cuire. Ils feront la joie des hôtes du camp légionnaire de Vindonissa, à Brugg-Windisch. Plus connu en Suisse alémanique sous le nom de "Legionärspfad Vindonissa".
Si l'aventure vous tente, on peut y louer et loger dans un des "contuberniae", local ainsi nommé car il permettait d'abriter la plus petite unité de légionnaires romains, le contubernium, soit 8 à 10 hommes selon les époques.
Alors, si faire la cuisine à la romaine et partager le quotidien du légionnaire vous tente:
https://www.ag.ch/de/bks/kultur/museen_schloesser/legionaerspfad/legionaerspfad.jsp
Une belle série de mortiers, marmites et plats à cuire. Ils feront la joie des hôtes du camp légionnaire de Vindonissa, à Brugg-Windisch. Plus connu en Suisse alémanique sous le nom de "Legionärspfad Vindonissa".
Si l'aventure vous tente, on peut y louer et loger dans un des "contuberniae", local ainsi nommé car il permettait d'abriter la plus petite unité de légionnaires romains, le contubernium, soit 8 à 10 hommes selon les époques.
Alors, si faire la cuisine à la romaine et partager le quotidien du légionnaire vous tente:
https://www.ag.ch/de/bks/kultur/museen_schloesser/legionaerspfad/legionaerspfad.jsp
mercredi 19 février 2014
Céramiques engobées et métallescentes des Gaules romaines
Première partie: les céramiques engobées.
Le sujet est très vaste. Le traiter en un seul article serait fastidieux, ou nécessiterait des raccourcis ou coupes dommageables. Dans cette première partie, nous traiterons donc essentiellement des céramiques engobées.
Et pour préciser enfin, les Gaules, dans leurs délimitations antiques, comprennent toutes les régions situées entre Rhin et Pyrénées, entre Manche et Méditerranée. Si le Piémont et la Lombardie actuelle formaient la Gaule Cisalpine aux temps de la République romaine, nous n’en traiterons pas ici. Non seulement, sous l’Empire ces régions seront rattachées aux provinces italiennes et alpines, mais leurs traditions céramiques sont trop différentes pour être associée à cette évocation.
Il en est de même pour le plateau helvète. A la frontière des zones d'influence, on y trouve des céramiques engobées aussi bien sombres que claires. Et plus on se dirige vers l'Est, plus on approche des zones culturellement rattachées à l'aire germanique, et plus la proportion de vaisselle sombre est importante. La Suisse romande, bien que rattachée à la province de Germanie supérieure, semble conserver une certaine attache culturelle avec l'aire rhodanienne.Ainsi donc la production de vaisselle engobée claire y resta nettement dominante. De plus, les production sombres n'y furent que relativement rarement importées, malgré un courant économique plutôt favorable que l'on remarque par la présence assez fréquente de sigillées de Gaule de l'Est, notamment des officines de Rheinzabern. Il en est de même en ce qui concerne les importations de Gaule du Centre. La sigillée de Lezoux est omniprésente dans tous les sites ruraux et urbains, alors que les récipients engobés ou métallescents issus de ces régions sont extrêmement rares. Pour les potiers helvètes de Suisse occidentale, il n'aurait pas été très difficile de donner une teinte plus sombre à leur vaisselle à boire, mais apparemment les goûts locaux ne s'y prêtaient tout simplement généralement pas.
A gauche, un gobelet issu des ateliers de Bern-Engehalbinsel. On distingue encore les reflets irisés dont était pourvu le revêtement.
Un autre cas étonnant de chevauchement de styles est illustré par les productions des officines de Thonon, en Haute-Savoie. La dominante culturelle dans cette région de production devrait induire une gamme de produits à dominante claire, rouges ou brun-rouges. Mais cela n'a pas étonnamment pas été le cas et la part à tonalité sombre de ce vaisselier est assez importante. Cela nous laisse quelque peu songeurs quant à la clientèle à qui pouvaient être destinée cette vaisselle. Malheureusement on ne connaît pratiquement pas la zone dans laquelle cette vaisselle était diffusée. Quelques exemplaires clairs sont parvenus à Lausanne, et un ou deux gobelets sombres sont attestés au Valais.
L'exemplaire illustré ci-contre en est un bel exemple. Ce genre de céramique est très fréquent dans les niveaux du IIIème siècle de notre ère sur le plateau helvète. D'assez nombreux exemplaires sont conservés dans les réserves du Berner Historisches Museum, et sont très probablement issus des ateliers locaux. On connaît également une telle production à Avenches et à Augst. Il s'agit là toutefois d'une particularité régionale propre non seulement aux Helvètes, mais aussi à la province de Rhétie (Est suisse et Ouest Autriche): On les nomme d'ailleurs "Mortiers rhétiques" en référence à leur distribution géographique, mais aussi à laur forme et le présence d'un engobe. Plus tard, au Vème siècle, cet engobe sera parfois remplacé par une glaçure plombifère.
Ce bol issu des ateliers de Berne est un autre bel exemple de vaisselle de service engobé: La panse de ces bols est généralement décorée, et toute la palette des techniques de l'époque peut s'y exprimer, comme sur les gobelets.
Exhiber une telle vaisselle lors de la cena était un élément parmi d'autres signant l'appartenance à un groupe social bien défini. Une mode, un style décoratif n'était pas un fin, mais un moyen de se placer dans un groupe.
C'est en cela que ces céramiques engobées régionales sont intéressantes pour la recherche. Elles nous permettent de tenter de délimiter groupes ou strates sociales, mais aussi les aires d'influences culturelles. Mais c'est aussi un champ immense de découvertes et d'émerveillement sur une esthétique qui ne nous parvient généralement plus que par petits fragments. De petits éclats de voix dispersés dans la terre, qui nous racontent notre passé...
Dans les grands familles typologiques qui définissent la
céramique antique à vernis argileux, nous avons préalablement considéré les
sigillées ainsi que les céramiques à parois fines. Dérivant directement de ces
dernières, nous allons parcourir maintenant deux catégories distinctes, quoique
aux limites assez floues pouvant considérablement varier selon les chercheurs qui les
évoquent dans leurs études.
Pour les définir globalement :
Les céramiques engobées sont généralement des
céramiques fines pourvues d’un vernis argileux non ou partiellement grésé, parfois
mat, mais plus souvent brillant, montrant parfois des reflets irisés. Cette
catégorie apparaît dans le courant de la seconde moitié du 1er
siècle de notre ère, succédant aux productions à parois fines engobées, puis se
poursuivra durant tout le haut-empire avec une apogée durant le IIIème siècle,
où sur certains sites elle pourra constituer jusqu’à 70% du vaisselier, toutes
catégories confondues. Durant l’Antiquité tardive, cette production se
poursuivra longtemps encore, malgré une perte progressive de qualité. Les
ateliers savoyards seront probablement les derniers à la pratiquer, jusque vers
la fin du Vème siècle au moins.
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Céramiques fines engobées de l'atelier de Thonon. Ces pièces portent un revêtement argileux partiellement grésé, légèrement brillant avec parfois des reflets irisés. (Fin IIème siècle) |
Les céramiques métallescentes sont également des
céramiques engobées, mais dont le revêtement généralement bien grésé prend, par
des artifices de cuisson particuliers un reflet métallique qui peut aller
d’une simple irisation à un aspect franchement doré ou argenté.. Cette
définition s’applique souvent à un groupe de productions à vernis sombres
apparues dans le courant de la seconde moitié du IIème siècle,
d’abord discrètement en Gaule du Centre
et en Bourgogne, puis massivement en Gaule de l’Est, notamment dans les régions
rhénanes. Cette famille de céramiques verra son apogée entre les années 200 et
275, puis déclinera doucement durant le IVème siècle, dont elle ne verra pas
les dernières années.
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Céramiques métallescentes classiques du début du IIIème siècle. Leur revêtement est sombre, brillant et présente un reflet métallique. (Musée de la Cour d'Or, Metz) |
Le sujet est très vaste. Le traiter en un seul article serait fastidieux, ou nécessiterait des raccourcis ou coupes dommageables. Dans cette première partie, nous traiterons donc essentiellement des céramiques engobées.
Et pour préciser enfin, les Gaules, dans leurs délimitations antiques, comprennent toutes les régions situées entre Rhin et Pyrénées, entre Manche et Méditerranée. Si le Piémont et la Lombardie actuelle formaient la Gaule Cisalpine aux temps de la République romaine, nous n’en traiterons pas ici. Non seulement, sous l’Empire ces régions seront rattachées aux provinces italiennes et alpines, mais leurs traditions céramiques sont trop différentes pour être associée à cette évocation.
LES CERAMIQUES ENGOBEES GALLO-ROMAINES:
Techniquement, une céramique engobée peut se nommer de
plusieurs manières : Céramiques à revêtement argileux, à vernis argileux,
parfois encore céramiques luisantes, mais résultent toujours d’une même
technique. D’abord tourné, un récipient est mis à sécher jusqu’à atteindre la
dureté d’un cuir ou d’un carton fort. A ce stade, on va éventuellement corriger
sa forme, affiner ses parois et réaliser ses moulures par enlèvement de copeaux
(c’est le tournassage) puis le polir, généralement à l’aide de galets, parfois
de spatules métalliques. On y apposera éventuellement un décor par estampage, à
la lame vibrante ou par dépôts de barbotine, puis on laisse sécher.
Le vernis que l’on va y apposer est toujours constitué d’une
argile très affinée en suspension dans de l’eau. Le type d’argile utilisé pour
fabriquer ces vernis peut faire fortement varier ses caractéristiques. Un
vernis peut être mat ou au contraire très brillant. Il peut être simplement
cuit, ou au contraire se vitrifier partiellement sous l’effet de hautes
températures.
Engobage d'une céramique fine. Une fois séchée et cuite, la couche de vernis argileux ne dépassera pas quelques millièmes de millimètres d'épaisseur. |
Chaque atelier avait sa recette. Si un vernis mat est simple
à préparer, un revêtement brillant peut demander des années, des décennies de
recherches et de mise au point. La qualité de l’argile est alors essentielle et
les potiers se sont parfois approvisionnés dans des gisements fort éloignés de
leur atelier. Ce n’était pas un problème. Ces revêtements argileux sont très
fins, quelques millièmes de millimètres tout a plus, et deux mules portent
facilement la quantité de terre nécessaire à l’engobage de dizaines de milliers
de récipients.
A Gauche, un gobelet à revêtement mat de la Vallée de l'Argonne. Début du IIème siècle de notre ère. Les revêtements de cette époque pour la région sont généralement brun mat, parfois aussi orangés.
Les premières productions sont toujours difficiles à
définir, se situant aux marges d’autres catégories, telles que les sigillées et
leurs imitations, ou encore la céramique à parois fines.
Comme nous l’avons vu dans un article précédent, cette
production, et surtout l’ensemble des formes qui y était associée,
essentiellement des bols et des gobelets,
évolue vers la fin du Ier siècle à Lyon et à Lezoux pour
prendre une morphologie particulière qui annonce l’esthétique des pièces du
second siècle. La production lyonnaise semble s’éteindre progressivement,
tandis que celle de Lezoux prendra plutôt un peu de vigueur avec les années.
![]() |
Un gobelet à revêtement sablé de Lezoux. On se situe clairement à là limite entre céramiques à parois fines et céramiques engobées. Seconde moitié du Ier siècle. ( Musée Dobrée, Nantes) |
Une production massive se développera très rapidement dès le
tournant du siècle dans les ateliers du Nord-est des Gaules, particulièrement à
Cologne, ainsi que dans les provinces bordant le Rhin, Alsace y compris. Un peu
plus tard, vers les années 150 à 170, de nombreux ateliers démarreront de
telles productions en Gaule du Centre, mais aussi sur le Plateau helvète et en
Savoie, toutefois sans rivaliser avec les quantités produites dans les régions
rhénanes ou de la Vallée
de l’Argonne. Simultanément, la
Bourgogne verra aussi se développer cette spécialité dans
plusieurs ateliers importants tels que Gueugnon, Domecy-sur-Cure ou
Jaulges-Villiers-Vineux. Lezoux continuera également à produire des céramiques
fines engobées ou métallescentes, bien que l’accent principal de ce groupe d’ateliers
restera focalisé sur la sigillée.
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Gobelet de Cologne à "Décor de chasse". Le revêtement est sombre, plutôt mat. |
Il semble bien que ce soient les ateliers de Gaule Centrale,
notamment du groupe de Lezoux, qui développèrent le processus jusqu’à atteindre
un point de grésage des revêtements suffisant pour les pourvoir d’un lustre
métallique. Ce furent apparemment les premiers à rechercher systématiquement
les argiles calcaires pour tourner le corps de leurs vases. Ces terres ont pour
faculté essentielle de favoriser l’accroche et surtout la vitrification
partielle de l’engobe, phénomène essentiel pour l’obtention de revêtements
brillants ou métallescents.
Il n'est pas très facile de dater cette expansion de la mode de la céramique fine à revêtement argileux métallescent. On la situe en général vers les années 160-175, soit plusieurs dizaines d'années après l'apparition de la technique à Lezoux. Car il s'agit bien d'une technique, alliant un choix de composants argileux bien spécifiques à une ou plusieurs techniques de cuisson bien particulières. Cette mode ne toucha essentiellement que les Gaules du Nord, du Centre et de l'Est, régions dans lesquelles la vaisselle à boire sombre connaissait déjà un grand succès. Par contre, la moitié sud ne fut que très marginalement touchée. La vaisselle sombre y est pratiquement inconnue, et hors les répertoires de la sigillée et de ses imitations proches, la vaisselle fine engobée resta peu abondante, et presque toujours de couleur rouge.
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Gobelets à revêtement argileux du Musée d'Arles. (IIème-IIIème siècle) Les vases à boire rouges gardèrent toujours la faveur des consommateursdans les Gaules du Sud. |
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Un gobelet à revêtement argileux d'Avenches. |
A gauche, un gobelet issu des ateliers de Bern-Engehalbinsel. On distingue encore les reflets irisés dont était pourvu le revêtement.
Un autre cas étonnant de chevauchement de styles est illustré par les productions des officines de Thonon, en Haute-Savoie. La dominante culturelle dans cette région de production devrait induire une gamme de produits à dominante claire, rouges ou brun-rouges. Mais cela n'a pas étonnamment pas été le cas et la part à tonalité sombre de ce vaisselier est assez importante. Cela nous laisse quelque peu songeurs quant à la clientèle à qui pouvaient être destinée cette vaisselle. Malheureusement on ne connaît pratiquement pas la zone dans laquelle cette vaisselle était diffusée. Quelques exemplaires clairs sont parvenus à Lausanne, et un ou deux gobelets sombres sont attestés au Valais.
Uniquement des gobelets?
Si les débuts de la production de céramiques engobées concernèrent essentiellement les vases à boire, progressivement d'autres formes seront concernées, d'abord uniquement la vaisselle de service, puis aussi quelques types de vaisselle utilitaire telle que les mortiers entre autres.![]() |
Berner Historisches Museum (réserves) |
Ce bol issu des ateliers de Berne est un autre bel exemple de vaisselle de service engobé: La panse de ces bols est généralement décorée, et toute la palette des techniques de l'époque peut s'y exprimer, comme sur les gobelets.
Exhiber une telle vaisselle lors de la cena était un élément parmi d'autres signant l'appartenance à un groupe social bien défini. Une mode, un style décoratif n'était pas un fin, mais un moyen de se placer dans un groupe.
C'est en cela que ces céramiques engobées régionales sont intéressantes pour la recherche. Elles nous permettent de tenter de délimiter groupes ou strates sociales, mais aussi les aires d'influences culturelles. Mais c'est aussi un champ immense de découvertes et d'émerveillement sur une esthétique qui ne nous parvient généralement plus que par petits fragments. De petits éclats de voix dispersés dans la terre, qui nous racontent notre passé...
La céramique métallescente en Gaule romaine
Seconde partie de l'article "Céramiques engobées et métallescentes de Gaule romaine":
Les céramiques métallescentes.
Evoquer les termes de
« céramique métallescente » c’est d’emblée se heurter à un problème
de définition. Par essence ce terme qualifie l’aspect visuel d’un engobe
argileux qui, par les reflets métalliques qu’il arbore, donne l’aspect de
l’étain ou de l’argent, parfois aussi du bronze ou du cuivre polis. De cet
aspect extérieur, on en a fait une catégorie de céramiques à engobe argileux sombre,
que ce revêtement ait des reflets métalliques ou non. De plus, selon les
groupes de chercheurs, les dénominations peuvent encore varier.
« Firnisware » ou « Glanztonkeramik » en aire germanophone,
« colour coated ware » ou encore « black slipped ware »
chez les anglophones, « céramiques engobées », « céramiques à
revêtement argileux », « céramiques métallescentes » pour les
chercheurs francophones. Et encore ces derniers n’appliquent pas tous les mêmes
critères de définition en Belgique, en Suisse romande ou en France...
Le tesson
sous-jacent des céramiques métallescentes cuites selon ce mode seront toujours
clairs, comme le seront certains décors superposés à l’engobe, par exemple sur
les gobelets à devises des ateliers du groupe de Trèves. La majorité des
céramiques à revêtement argileux des IIème et IIIème siècles sont produites
suivant ce mode A, soit une cuisson réductrice-oxydante suivie d’une
post-cuisson oxydante
C'est ainsi qu'il devient parfaitement possible d'ajouter un décor clair sur un revêtement métallescent noir. C'est uniquement une question de choix d'argiles. La terre utilisée pour le décor ne doit pas gréser à la cuisson, et ainsi elle se réoxydera et reprendra "facilement" sa couleur claire lors du refroidissement. En théorie, c'est facile à comprendre. Le mettre en pratique est une autre histoire...
Les céramiques métallescentes.
Comme nous l’avons précisé
dans le précédent article, la céramique métallescente n’est qu’une variante
dans la grande famille des céramiques fines engobées gallo-romaines. Elle se
distingue généralement par une gamme de surfaces aux couleurs sombres présentant
un reflet métallique prononcé. Ces coloris et reflets sont le résultat d’une
volonté d’obtenir un grésage (vitrification partielle) foncé de la surface Cette
céramique est issue d’une dizaine d’ateliers en Gaule du Centre, principalement
Auvergne et Bourgogne, et probablement plus d’une quinzaine en Gaule de l’Est,
Alsace, Moselle (Argonne) , Lorraine et Rhénanie.
A la base, ce répertoire
comprend une série de formes bien délimitée, comprenant essentiellement de la
vaisselle à boire, gobelets, pichet et cruches.
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Une belle palette de céramiques métallescentes typiques. Productions de Trèves (actuellement en Allemagne) pour la plupart. Leur revêtement est sombre, et souvent suffisamment irisé pour donner un aspect métallique à la surface ainsi traitée. (Musée de Tongres) Photo http://www.galloromeinsmuseum.be/exposition_permanente/la_collection |
CERAMIQUES METALLESCENTES, UN PROBLEME DE
DEFINITION ?
![]() |
Un gobelet tulipiforme métallescent, probablement issu des ateliers de Lezoux, il a été découvert à Bavai et se trouve exposé au Musée de la Ville |
Après le Colloque de Louvain-la
Neuve en 1995, un certain consensus est apparu pour attribuer le terme de
« métallescent » aux revêtements noirs à reflets métalliques, sans
que le problème de définition des engobes plus clairs présentant ce type de
reflets soit vraiment résolu. L’interrogation sur la définition générale de
« métallescente » pour un groupe de formes des IIème et IIIème
siècles, presque uniquement des gobelets, dont les revêtements sombres
présentent des reflets métalliques ou non, n’a pas vraiment trouvé d’issue, quoique
dans les années qui ont suivi, un consensus dans cette direction s’est tout de
même dégagé. C’est donc dans ce sens que Fabienne Vilvorder, Raymond Brulet et
Paul Symonds ont rédigé l’indispensable « Dictionnaire des céramiques
romaines en Gaule du Nord », ouvrage essentiel pour quiconque s'intéresse à ce genre de vaisselle, quelle que soit le région des Gaules.
Il n’en reste pas moins que
ce sujet est toujours l’objet de belles palabres et nous n’allons pas tenter
de mettre tout ce petit monde d’accord ici. Mais pour plus de commodité, dans
les paragraphes qui suivent, le terme « irisé » définira un revêtement
ou un engobe à reflets métalliques. Donc un aspect externe, hors de toute
considération typologique, et le terme « métallescent » se rapportera
à une classe de céramiques bien précises dans le répertoire des formes des
vases à boire notamment.
LES MODES DE CUISSON :
Cuisson réductrice-oxydante, post
cuisson oxydante. La montée en température est toujours faite d’une
alternance de phases oxydantes et réductrices, au gré de l’introduction des
brassées de bois dans le foyer.
Dès la température maximale atteinte, on laisse le feu s’éteindre, et l’air
atmosphérique se réintroduira dans la charge à cuire et provoquera une
oxydation générale de la charge en cours de cuisson. C’est le mode de cuisson
de toutes les céramiques communes claires, et de des céramiques à revêtement
argileux irisés, métallescents ou simplement luisants, à tesson clair. Les
coloris des revêtements argileux peuvent s’échelonner du rouge au noir, selon
les températures atteintes et la conduite du feu. On peut donc parfaitement
associer la cuisson de céramiques à revêtement argileux de ce type avec des
communes claires.
Un tesson de céramique métallescente de type A. L'aspect du revêtement est franchement métallique, la cassure du tesson est claire. Cette céramique a été réoxydée après cuisson. C'est le cas de la plupart des métallescentes actuellement classifiées comme telles.
Cet exemplaire au revêtement craquelé pourrait être une production d'Autun. Jusqu'à peu, la fabrication de tels gobelets dans cette ville était très incertaine. Mais des fouilles récentes aux Faubourgs d'Arroux pourraient changer la donne après la découverte d'un nouvel atelier et de nombreux tessons de ce type.
Cuisson réductrice-oxydante, post cuisson réductrice. La montée en température est toujours faite d’une
alternance de phases oxydantes et réductrices, au gré de l’introduction des
brassées de bois dans le foyer. Dès la température maximale atteinte, on
provoque une réduction, éventuellement un enfumage en scellant le four au
torchis, ceci de la manière la plus
hermétique possible, après avoir
préalablement bourré le foyer de combustible. Un bois humide favorisera un bon
enfumage, tandis que des combustibles secs donneront plutôt un enfumage léger
sans prétériter la réduction. Certains types de céramiques à revêtement
argileux sont réalisées de cette manière, notamment quelques types de terra nigra engobées, dont des
imitations de sigillées noires, mais aussi certaines dérivées tardives de terra nigra, dont d’assez abondantes
productions de vases à liquides des IIIème et IVème siècles. Le tesson est souvent gris, quoique certaine argiles
prenant mal la réduction conserveront un cœur brun-rouge sombre. Dans ces cas on
observe souvent en plus un zonage gris ou noir sous le revêtement. Certaines de ces
productions peuvent être d’aspect fortement irisé et font donc partie de la
classe de la céramique métallescente.
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Un gobelet issu des ateliers de Berne. Son tesson est gris, et sa couverte a conservé une bonne partie de son irisation d'origine. (Réserves du Berne Historisches Museum) |
Ces céramiques à revêtement
argileux peuvent parfaitement être associées à des communes grises lors de leur
cuisson.
Les revêtements irisés ou métallescents obtenus en
mode de cuisson A.
Ce groupe de revêtements
inclut à la base tous les coloris disponibles dans la gamme des revêtements
argileux. Bien que très souvent le « fond » du revêtement soit noir
ou au moins très sombre, on trouve de nombreuses variantes plus claires que l'on classifie parfois dans le domaine des céramiques engobées..
Les revêtements sombres
peuvent arborer des reflets cuivrés ou argentés, même parfois violacés.
Lorsqu’on a affaire à des fonds plus clairs, généralement bruns-rouges ou
orangés plus ou moins foncés, ou parfois encore bruns-verts, les reflets sont
le plus souvent cuivrés. Toutefois, quelle que soit la couleur du fond, les
effets de reflet peuvent considérablement varier en fonction de la lumière
ambiante. Ainsi l’aspect de surface d’une céramique à reflets métallescents
sera totalement différent dès lors qu’on l’expose à la lumière d’une ampoule à
incandescence ou en plein jour sous un ciel bleu.
Les revêtements métallescents obtenus en mode de
cuisson B
Toujours sombres, suivant
une gamme de coloris allant du gris au noir, ces revêtements peuvent arborer
des reflets métalliques discrets, mais parfois aussi très prononcés. Le plus
souvent argentés, ils peuvent aussi parfois prendre des reflets cuivrés ou
violacés, façon «aile de corbeau »
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Un gobelet à haut col métallescent. probablement issu des ateliers de l'Argonne, (lieu d'exposition inconnu) Cuisson mode B |
Le tesson sous-jacent est
souvent gris, mais parfois aussi brunâtre avec un liseré, un
« zonage » gris ou noir sous le revêtement.
Bien que moins fréquentes
que la catégorie précédente, ces céramiques se rencontrent dans le bassin de
l’Argonne, et peut-être ailleurs en Gaule de l’Est, peut-être l'atelier de Brumath.
Fabienne Vilvorder a reconnu
des tessons de ce type cuits en mode B notamment dans les ateliers d’Avocourt 3
et Les Allieux. Mais sur les 33 ateliers ayant produit des céramiques engobées
et/ou métallescentes en Gaule de l’Est, nous n’avons que fort peu de
description sur les couleurs des pâtes, et leur éventuelle différentiation
entre productions engobées cuites en mode A et productions métallescentes A ou
B.
On trouve également ce genre
de production à Thonon, avec des revêtements allant du gris au noir, très
rarement avec reflets métallescents. Les ateliers helvètes, notamment Berne et
Avenches ont également produit ce type de céramiques, réalisant des copies de
très belle qualité des productions des ateliers de Trèves, parfois franchement
métallescents. Ce mode de cuisson interdit toutefois les décors superposés, qui
deviendraient noirs mat au lieu des motifs blancs ou ivoire réalisés dans les
ateliers mosellans.
La vaisselle réalisée sur ce mode de cuisson est toutefois cuite à plus basse température que celle réalisée en mode A. On a donc des pièces d'un part moins résistantes aux chocs, et le revêtement est plus sensible à l'abrasion et au vieillissement.
COMMENT OBTIENT-ON LES REVÊTEMENTS
METALLESCENTS ?
Autant le préciser d’emblée,
il n’est pas simple aujourd’hui de reproduire de tels revêtements. Non
seulement le savoir-faire des potiers antiques s’est largement perdu, mais les
tentatives actuelles en expérimentation butent souvent sur des problèmes de
choix d’argiles. Les sources d’approvisionnement des ateliers antiques sont
généralement perdues, et justement ce sont le choix et l'assemblage des argiles qui apparaissent important si
l’on souhaite réaliser de tels revêtements. Ce n’est probablement pas sans
raison de ce genre que lorsque plusieurs ateliers issus de régions géologiques
différentes ont produit le même type de récipients, certaines de ces
productions arborent généralement des reflets métallescents alors que d’autres
ne les montrent pratiquement jamais.
Donc, ce n’est souvent qu’après
de multiples essais que l’on pourra tenter une approche systématique. Chaque
revêtement doit être testé sur plusieurs pâtes différentes, qu’elles soient
préparées industriellement ou artisanalement. Pour des raisons que l’on ignore,
les réactions d’un engobe sur une pâte peuvent passablement varier d’une
combinaison à l’autre. Si la présence de calcaire ou non peut être un facteur
important, la porosité ou la proportion de la fraction argileuse du tesson
semblent très importants aussi.
La qualité essentielle d’un
revêtement sera sa faculté de partiellement se vitrifier à relativement basse
température, généralement entre 1000 et 1080 degrés selon sa composition. C’est
une couverte de type « sigillée », donc une argile extrêmement épurée
par décantations successives.
Lors de la cuisson en mode
A, soit réductrice-oxydante avec post-cuisson oxydante, il est nécessaire
d’atteindre cette température de grésage lors du grand feu. Une éventuelle
phase de réduction peut être nécessaire pour assombrir le revêtement, puis dans
un second temps l’apport d’oxygène oxydera le quartz présent dans l’engobe et
le rendra irisé, un peu à la façon des verres de Murano.
Par
contre lors de la cuisson en mode B, il ne faut pas atteindre le point de
grésage lors du grand feu, mais immédiatement procéder à une réduction complète
avec enfumage. On ne connaît pas le processus de la réaction qui reste assez mystériqux, mais il est
probable que l’on ait affaire à une combinaison de carbone sous forme de
graphite avec certains des composants de l’engobe aboutissant à la constitution
d’une pellicule argentée. Ce type de revêtement est parfaitement étanche,
semble grésé en surface, mais est apparemment plus tendre que ceux réalisés
selon la méthode précédente.
QUELQUES REGIONS DE PRODUCTION:
La Gaule du Centre:
Initiée par les ateliers de Lezoux, cette production a petit à petit essaimé dans des centres secondaires de la même région, comme Vichy, ou Toulon-sur-Allier
C'est une production précoce qui apparaît à Lezoux dès le milieu du IIème siècle, un peu plus tard dans les autres officines. la réalisation est très soignée, les parois sont fines et le mode de cuisson toujours en A
L'apogée de cettte production se situe vers l'an 200, puis déclinera quantitativement ensuite.
La Bourgogne:
5 ateliers ont produit des céramiques engobées ou métallescentes:
Gueugnon:
Parallèlement à une production de sigillée attestée dès le début du IIème siècle. une production de métallescente a vu le jour au milieu du IIème siècle et à duré jusque vers 260, avec une production de gobelets, mais aussi d'assiettes et de bols. Production uniquement en mode A
Domecy-sur-Cure et Champallement:
Production importante de céramiques fines engobées et parfois de métallescentes également aux IIème et IIIème siècles de notre ère. Comme sur ce tesson découvert à Autun, les revêtements sont souvent fortement irisés, mais généralement plus clairs que ceux de Gaule de l'Est. Ce tesson pourrait provenir de Domecy, mais aussi d'un atelier autunois.
Jaulges-Villiers-Vineux (Yonne)
C'est un important groupe d'ateliers situé à cheval sur les communes de Jaulges et Villiers-Vineux. les ateliers s'alignent sur plus d'un kilomètre le long de l'ancienne voie romaine. Production de sigillée, plutôt discrète, et très importante production de gobelets, assiettes et bols, qui ont été diffusés pratiquement sur toute la moitié nord des Gaules. Atelier actif du IIème au Vème siècle.
Typiquement, celle vaisselle présente des reflets plutôt cuivrés que sombres.
En Gaule de l'Est:
Le terrain est vaste, et au moins 33 ateliers ont fabriqué des céramiques engobées ou métallescentes. Beaucoup d'entre eux sont mal connus, et n'ont été l'objet que de reconnaissances sommaires.
La Vallée de de l'Argonne par plusieurs ateliers, notamment Avocourt et les Allieux, a assuré une production très importante de gobelets, dont on a déjà vu un exemplaire plus haut.. Les formes y sont assez diverses. Gobelets à haut col, souvent ornés de dépressions, mais aussi gobelets tulipiformes à haut pied, comme l'exemplaire de droite ci-dessous
L'Alsace, par plusieurs ateliers et notamment Bourgheim et Brumath connaissent un assez fort développement de ces variétés de céramique toujours aux mêmes époques. L'exemplaire de gauche ci-dessus, très atypique par sa forme provient d'un atelier encore inconnu. Le centre de gravité des découvertes de récipients montrant cette forme se situe dans le département du Bas-Rhin, mais l'atelier de production reste à découvrir. Ce cas de figure illustre bien tout ce qu'il reste à découvrir sur cet artisanat.
Les ateliers de Rhénanie:
Probablement les plus nombreux , ils sont plus de 20 a avoir fabriqué des céramiques engobées. Mais c'est avant tout l'atelier de Trèves (Augusta Treverorum, capitale de cité de trévires, puis capitale impériale à la fin du IIIème siècle) qui s'est rendu célèbre par sa splendide production de céramique métallescente.
Ces ateliers ont été actifs dès le Ier siècle de notre ère. D'abord ce sont des céramiques "belges" qui y ont été fabriquées, puis dès 130 environ démarre une production de sigillée, ainsi que probablement les premières céramiques fines engobées, remplacées vers la fin du siècle par la céramique métallescente qui connaîtra son apogée au IIIème siècle. Une courte interruption semble s'être produite vers les années 275 marquées par des conflits avec les peuples germaniques. Une deuxième phase de production s'établit entre 275-280 et 350 environ. Mais la qualité de la première phase ne sera jamais totalement retrouvée.
Les pièces les plus évoluées montrent parfois ds portraits de divinités, comme l'exemplaire ci-contre sur lequel on remarque ceux de Minerve et Hermès. L'apposition de devises à boire est très fréquente et appraît presque systématiquement lors de décors à la barbotine blanche.
Réaliser de telles pièces en une seule cuisson est un tour de force. Rappelons qu'in ne s'agit pas de "peintures" mais de sélections d'argiles qui doivent, une fois cuites présenter des coloris bien précis. Et en plus il faut qu'elles accrochent sur l'engobe préalablement posé.
Généralement toutefois, on s'est contenté d'un décor blanc, ou en deux couleurs, le blanc et l'orangé ou le rose pour les grappes. Le blanc est réalisé à partir d'une argile ne contenant pas d'oxyde de fer, tandis que les roses ou orangés sont obtenus par des mélanges d'argiles blanches et de terres plus ferrugineuses
Nous terminons ici ce tour d'horizon et renterons plus tard de devenir sur des régions de production plus précises. Pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus, les ouvrages ci-dessous sont très précis et indispensables. Mais très, très techniques...
Ouvrages de référence cités:
![]() |
Un lot de gobelets métallescents cuits en mode A. ( répliques de pièces alsaciennes) |
QUELQUES REGIONS DE PRODUCTION:
La Gaule du Centre:
![]() |
Un gobelet sphéroïde à décor floral. Parfois attribué à Lezoux, parfois à Toulon-sur-Allier. Cuisson mode A (lieu d'exposition inconnu) |
C'est une production précoce qui apparaît à Lezoux dès le milieu du IIème siècle, un peu plus tard dans les autres officines. la réalisation est très soignée, les parois sont fines et le mode de cuisson toujours en A
L'apogée de cettte production se situe vers l'an 200, puis déclinera quantitativement ensuite.
La Bourgogne:
5 ateliers ont produit des céramiques engobées ou métallescentes:
Gueugnon:
Parallèlement à une production de sigillée attestée dès le début du IIème siècle. une production de métallescente a vu le jour au milieu du IIème siècle et à duré jusque vers 260, avec une production de gobelets, mais aussi d'assiettes et de bols. Production uniquement en mode A

Production importante de céramiques fines engobées et parfois de métallescentes également aux IIème et IIIème siècles de notre ère. Comme sur ce tesson découvert à Autun, les revêtements sont souvent fortement irisés, mais généralement plus clairs que ceux de Gaule de l'Est. Ce tesson pourrait provenir de Domecy, mais aussi d'un atelier autunois.
![]() |
Gobelet de Jaulges-Villiers-Vineux |
Jaulges-Villiers-Vineux (Yonne)
C'est un important groupe d'ateliers situé à cheval sur les communes de Jaulges et Villiers-Vineux. les ateliers s'alignent sur plus d'un kilomètre le long de l'ancienne voie romaine. Production de sigillée, plutôt discrète, et très importante production de gobelets, assiettes et bols, qui ont été diffusés pratiquement sur toute la moitié nord des Gaules. Atelier actif du IIème au Vème siècle.
Typiquement, celle vaisselle présente des reflets plutôt cuivrés que sombres.
En Gaule de l'Est:
Le terrain est vaste, et au moins 33 ateliers ont fabriqué des céramiques engobées ou métallescentes. Beaucoup d'entre eux sont mal connus, et n'ont été l'objet que de reconnaissances sommaires.
La Vallée de de l'Argonne par plusieurs ateliers, notamment Avocourt et les Allieux, a assuré une production très importante de gobelets, dont on a déjà vu un exemplaire plus haut.. Les formes y sont assez diverses. Gobelets à haut col, souvent ornés de dépressions, mais aussi gobelets tulipiformes à haut pied, comme l'exemplaire de droite ci-dessous
L'Alsace, par plusieurs ateliers et notamment Bourgheim et Brumath connaissent un assez fort développement de ces variétés de céramique toujours aux mêmes époques. L'exemplaire de gauche ci-dessus, très atypique par sa forme provient d'un atelier encore inconnu. Le centre de gravité des découvertes de récipients montrant cette forme se situe dans le département du Bas-Rhin, mais l'atelier de production reste à découvrir. Ce cas de figure illustre bien tout ce qu'il reste à découvrir sur cet artisanat.
Les ateliers de Rhénanie:
Probablement les plus nombreux , ils sont plus de 20 a avoir fabriqué des céramiques engobées. Mais c'est avant tout l'atelier de Trèves (Augusta Treverorum, capitale de cité de trévires, puis capitale impériale à la fin du IIIème siècle) qui s'est rendu célèbre par sa splendide production de céramique métallescente.
Photo Trierer Rheinisches Landesmuseum (www.landesmuseum-trier.de) |
Les pièces les plus évoluées montrent parfois ds portraits de divinités, comme l'exemplaire ci-contre sur lequel on remarque ceux de Minerve et Hermès. L'apposition de devises à boire est très fréquente et appraît presque systématiquement lors de décors à la barbotine blanche.
Réaliser de telles pièces en une seule cuisson est un tour de force. Rappelons qu'in ne s'agit pas de "peintures" mais de sélections d'argiles qui doivent, une fois cuites présenter des coloris bien précis. Et en plus il faut qu'elles accrochent sur l'engobe préalablement posé.
Bouteilles exposées au Landesmuseum de Trèves Photo Trierer Rheinisches Landesmuseum (www.landesmuseum-trier.de) |
Nous terminons ici ce tour d'horizon et renterons plus tard de devenir sur des régions de production plus précises. Pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus, les ouvrages ci-dessous sont très précis et indispensables. Mais très, très techniques...
Ouvrages de référence cités:
LA
CERAMIQUE ROMAINE EN GAULE DU NORD.
Dictionnaire des céramiques:
Raymond Brulet, Fabienne Vilvorder et Richard Delage . Brepols Publishers,
Turnhout, Belgique, 2010. ISBN 978-2-503-53509-8.
CERAMIQUES ENGOBEES ET METALLESCENTES
GALLO-ROMAINES :
Brulet R. ,Symonds P et Vilvorder F. (Dir.) : Actes du colloque organisé à
Louvain-la-Neuve en 1995. Rei Cretariae Romanae Fautores, Oxford, 1995
SYMONDS R.-P.
Rhenish wares. Fine dark coloured pottery from Gaul and Germany. Oxford University Committee for Archeology,
Oxford, 1992
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