jeudi 10 novembre 2011

Fabriquer la céramique à parois fines

Fabriquer de la céramique à parois fines gallo-romaine !

Un tel exercice est assurément un des plus délicats de toutes les nombreuses variétés de céramique antique. Il demande une longue expérience et par moments un calme à toute épreuve. Le moindre faux mouvement et la pièce est irrémédiablement endommagée.
La série de clichés illustrant cet article sont tirés de plusieurs fabrications distinctes. J’ai choisi les plus représentatifs d’entre eux afin d’illustrer au mieux cet article.

Le tournage ne pose pas de problèmes particuliers. Il est malgré tout important de tourner le plus fin possible en fonction de la tenue de la terre.
Comme souvent pour les gobelets, il faut en premier développer la panse, et si le col est trop étroit pour laisser passer la main, on le rétrécit en dernier par étranglement. L’idéal est de laisser une légère surépaisseur de terre sur la partie basse de récipient, mais de tourner le haut à son épaisseur définitive, en ébauchant les moulures du col à l’estèque, sorte de petite spatule en bois ou en os. Ainsi, on minimise le travail de tournassage, et la pièce n’est pas trop fragile lorsqu’on la retire de la girelle pour la mettre à sécher.

La pièce est ensuite laissée à sécher quelques heures afin qu’elle se raffermisse.
Vient ensuite l’opération la plus importante et probablement la plus délicate, le tournassage, qui consiste à amincir les parois par enlèvement de copeaux au moyen d’un outil coupant.



Travailler sur un tour moderne est une chose. Procéder à cette opération sur une tournette romaine à main en est un autre… Ici, le cliché a été pris lors d’une démonstration costumée, lors des journées gallo-romaines de St.-Romain-en-Gal. C’est une installation très rustique, avec un peu de jeu dans l’axe, donc à priori peu adaptée au travail de grande précision. De petits tours de main permettent toutefois de fabriquer des vases aux parois étonnamment minces. Ici l’épaisseur du col doit approcher 1 mm.
Retouche du col. La pièce est placée dans un mandrin afin d’être calée le plus fermement possible sans se déformer. Puis, en dernier lieu, on procède à l’amincissement du pied.

Dés le tournassage terminé, on procède au polissage.
Cette opération se fait au galet, y compris le marquage des éventuels sillons qui délimiteront le champ du décor. Cette opération ne se fait pas sur toutes les pièces. Beaucoup de céramiques à parois fines tells que celle-ci-dessous, sont de simples terres cuites, sans vernis argileux. Ce sont d’ailleurs souvent les plus fines, celles que l’on nomme parfois des « Coquilles d’œuf ». Les polir au galet ou à la spatule risquerait de les déformer.










 Une tasse fragmentaire provenant des niveaux anciens d’une domus de Musarna (Près de l’actuelle Viterbe, Italie) et sa réplique. Ce genre de céramiques à parois fines est simplement lissée au doigt ou à l'aide d'un éponge humide après amincissement des parois. On n'y applique pas de vernis.

Immédiatement après on applique le décor. Que ce soit par impression, pose de motifs d’applique ou décor à la barbotine, on travaille lorsque la pièce est encore « verte », c'est-à-dire humide et tendre pour éviter que les décors se décollent lors du séchage. La placer sur un support diminue les risques de déformations et de marques de doigts.
Les décors à la barbotine sont difficiles à appliquer régulièrement. Il n’y a pas de droit à l’erreur. Les coulures sont impossibles à effacer et laissent toujours des traces disgracieuses. Les écailles sont formées de petites gouttes de barbotine étalées à la spatule.. 













Décor de lunules en pointillés de barbotine pour ce classique de la céramique italienne à parois fines. ces pièces ne portent pas de vernis argileux et sont de simples terres cuites.




 Après quelques jours de séchage, les pièces qui le nécessitent sont engobées d’un revêtement argileux.


Puis mises à sécher encore quelques jours. On pourra alors les cuire. Une température de 950 à 1000 degrés vitrifiera partiellement le revêtement et leur donnera cette belle robe brun-rouge caractéristique des céramiques gallo-romaines cuites dans les fours à flamme nue.













Réplique d'un gobelet lyonnais à décor de picots.



Deux gobelets de Gaule du Centre à décor de cordons fendus. Ce genre de décor devient très fréquent dès la seconde moitié du premier  siècle de notre ère.

















Deux bols lyonnais à appliques grénelées. Ces appliques sont faites de petites pastilles de terre collées avant cuisson en engobage








  Deux bols lyonnais sablés...

Et enfin deux autre bols lyonnais:



Décor crépi...











Et panse guillochée.

















Et les pièces moulées ?
Eh bien, ô lecteur, cela viendra un jour. Mais d’abord il faut que je fabrique un moule… Et ça, c’est toute une aventure…





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